Sommaire
- 1 Introduction
- 2 La Rép. démocratique du Congo (RDC) doit renoncer aux parcs agro-industriels
- 3 Les titres du rapport Oakland Institute
- 4 Les mythes de la Banque mondiale sur l'agriculture et le développement
- 5 Bukanga-Lonzo - Faillite d'un système ?
- 6 Accaparement des terres = Land grabbing
- 7 A suivre ...
Introduction
L’arrêt des activités en 2018 du parc agro-industriel de Bukanga Lonzo était pressenti dès sa création en 2014 parce que reposant sur une arnaque menée par différentes mafias institutionnelles nationales et internationales du capitalisme casino enraciné dans la corruption des personnes et des valeurs.
Cette situation illustre à quel point l’option «Industrialisation de l’agriculture» est un leurre pour résoudre la question du droit à l’alimentation alliant respect des personnes, travail décent des producteurs, conservation de l’environnement et la production d’aliments sains à des prix abordables pour tous, dans un modèle de développement basé sur la solidarité et non, sur l’économie casino (la spéculation alimentaire, le profit financier avant les gens) dont l’agro-business est l’un des principaux piliers.
Le dossier : Parcs Agro-industriels, une arnaque !
A lire : Parc agro-industriel de Bukanga Lonzo - Bukanga Lonzo, les zones d’ombre
« Une chaîne complète de production qui va de la terre à l'assiette du consommateur. Vraiment ?
Le dossier : L’agro-business, poison de l’Humanité ?
La campagne de promotion du projet PAI lancée par le Premier ministre Matata Ponyo sous l’égide de son Président, Joseph Kabila, avait été soutenue par quantité de journalistes renommés pour leur connaissance du pays mais curieusement sans aucune analyse critique du projet alors qu’ils étaient bien aux faits des embrouillent dont le pouvoir congolais était et est toujours capable, et du choix politique totalement opposé aux principes de la nouvelle Loi agricole de 2011. Lire l’article : La révolution agricole a commencé dans le Bandundu
Sensé être l’exemple de la modernité alors qu’à l’époque déjà en Europe et ailleurs, l’agriculture conventionnelle, dite moderne (sic) était et est de plus en plus dénoncée pour ses dommages sur la santé des personnes, sur l’environnement et sur la répartition inégale des richesses. En 2017, Colette Braeckman écrivait déjà un article au titre révélateur de la supercherie : A Bukanga Lonzo le miracle se fait attendre. La fin des activités du parc en 2018 n’a pas eu la même ampleur médiatique… Quelques médias en ont parlé.
La Rép. démocratique du Congo (RDC) doit renoncer aux parcs agro-industriels
Oakland Institute a publié un rapport en avril 2019 ayant pour titre : « Parcs agro-industriels en RDC: Tirer les leçons de la débâcle de Bukanga Lonzo » ; il résume clairement la situation.
Voir les liens après la vidéo, ci-dessous
L'effondrement du projet pilote de Bukanga Lonzo montre que les parcs agro-industriels sont une fausse solution aux défis auxquels font face la RDC et l'Afrique en matière d'alimentation, d'agriculture et de réduction de la pauvreté.
Le parc a été créé sur des terres prises illégalement aux communautés locales après les avoir trompées sur le projet et son impact.
Le projet a abouti à de nombreuses violations des droits humains, de la pollution, du gaspillage de fonds publics, de sérieuses suspicions de détournement de fonds et de corruption, ainsi qu'à une action en justice contre le pays.
La Banque mondiale et la Banque africaine de développement sont les principaux moteurs, architectes et financeurs des parcs agro-industriels, alors que ceux-ci vont à l’encontre des intérêts du pays, de la volonté des agriculteurs et de leurs organisations et sont même contraires à la politique agricole du pays.
La débâcle de Bukanga Lonzo
Cliquez sur l’image pour ouvrir le rapport (.pdf) ou sur le lien ci-dessus pour accéder à la page de présentation sur le site web
Les titres du rapport Oakland Institute
Introduction
La débâcle de Bukanga Lonzo
Diagnostic d’un échec
- L’accaparement des terres des communautés locales
- L’acquisition des terres a violé les droits fonciers et les lois nationales
- Violations des droits humains Pollution et risques sanitaires
- Mauvaise gestion et suspicions de détournement de fonds et de corruption
- Droit du travail et conditions de travail
Un mauvais modèle basé sur de mauvaises hypothèses
- Des idées fausses sur l’agriculture congolaise
- La fausse bonne solution des parcs agro-industriels
- La banque mondiale et la BAD, chefs d’orchestre des PAI en RDC
A quoi ressemblerait une politique agricole adéquate ?
Les mythes de la Banque mondiale sur l'agriculture et le développement
Ce qu'ils en disent :
- 2019 - Environews-RDC - Agriculture : le parc agro-industriel de Bukanga Lonzo, un échec cuisant
- 2019 - La Libre Afrique -Agriculture en RDC: soutenir les familles plutôt que les industriels
- 2019 - Le Monde - Agriculture en RDC : un collectif d’associations appelle à soutenir les familles plutôt que les industriels
- 2019 - Oakland Institute - The World Bank is Driving a Failed Strategy in DRC
La conclusion du rapport Parcs agro-industriels en RDC – Tirer les leçons de la débâcle de Bukanga Lonzo :
Alors que ce premier parc a été conçu comme un projet pilote, bon nombre des problèmes identifiés ne constituent pas des erreurs qui peuvent être corrigées ou des ajustements qui peuvent être apportés, mais ont toutes les chances de se reproduire lors de la création de tout futur parc. Ceux-ci incluent :
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- La priorité donnée à l’agriculture industrielle, qui ne résout pas les problèmes auxquels sont confrontés les agriculteurs et le secteur agricole congolais dans son ensemble, mais leur prend leurs terres et des ressources naturelles vitales, compromettant leur moyens de subsistance;
- De tels grands projets augmentent les possibilités de corruption et de mauvaise gestion des importantes ressources publiques qui leurs sont allouées;
- Le manque de considération accordée aux ruraux pauvres, l’absence d’état de droit et un système juridique défaillant qui favorise les violations des droits de l’homme et l’accaparement des terres autour de tels projets;
- La richesse des ressources minérales de la RDC qui amène des intérêts étrangers à entreprendre des projets miniers sous couvert d’agriculture. (Il y aurait des diamants le long de la rivière !)
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Il est grand temps que le gouvernement congolais, et ses partenaires, la Banque mondiale et la BAD, tirent réellement les leçons de la débâcle de Bukanga Lonzo et mettent un terme au projet de développement de noauveaux parcs dans le pays. On sait déjà quoi faire pour le développement agricole du pays, puisque c’est inscrit dans la politique agricole et les demandes des organisations paysannes. Le financement est là, avec des revenus publics importants provenant des industries extractives et de l’aide internationale.
Ce qui manque est la volonté du gouvernement, car c’est bien à lui qu’incombe de changer de stratégie, et de financer et mettre en œuvre une politique agricole digne de ce nom, qui permettra effectivement au pays de mettre fin à la faim et à la pauvreté.
Aux quatre facettes décrivant la débâcle du projet,
- Fausse solution
- Accaparement de terres
- Violation des droits de la personne, pollution et risques sanitaires, corruptions
- Institutions bancaires mafieuses,
Il doit être mentionné une 5ème facette du système : l’implication directe des commanditaires de l’arnaque que sont en tout premier, le Président de la RDC de l’époque, Mr Joseph Kabila, son Premier ministre, Mr Matata Ponyo et leurs collaborateurs à la tête d’un Etat devenu une mafia nationalisée.
Il n’est pas anodin que le Ministère de l’Agriculture, de l’élevage et de la pêche ait été écarté de la gestion du parc, que tous les articles liés au parc étaient mis en ligne sur le site de la Primature, aucun sur le site de l’agriculture. Tous les articles ont été supprimés sur le site de la Primature et en date du 190408, le site du Ministère de l’agriculture est inaccessible !
En 2018, l’agence de presse Reuters dans son article Africa's green revolution stumbles at Congo project to solve food shortages rapportait les problèmes liés à la politique congolaise et aussi au fait que ce système de production industrielle n’était pas viable : il semble que le Mr Matata ait lui-même attribué les problèmes du parc à la mauvaise qualité des sols !
Pourtant, il est dit dans un article de l’ACP du 9 juin 2016 diffusé sur RDC Finance, Le parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo est une approche holistique, que : "S’agissant de la qualité du sol de Bukanga Lonzo, le document relève que M. Matata Ponyo a rassuré les sénateurs que des analyses détaillées ont été effectuées et ont déterminé les méthodes culturales, le type des machines, la qualité des intrants ainsi que la sélection des cultures." (sic)
Bukanga-Lonzo - Faillite d'un système ?
Accaparement des terres = Land grabbing
Land grabbing = Vol & Industrialisation de l'agriculture
La réponse à la question de savoir si l’expérience Bukanga Lonzo amènera le pays à réaliser enfin une politique centrée sur ses citoyens, est non, en tout cas pas à court terme ...
Car il est des « spécialistes » qui persistent à croire que ce système de production capitaliste a de l’avenir, allant jusqu’à affirmer que ce projet pilote n’est pas un échec, qu’il est « viable » sans en apporter la preuve, et mérite donc une nouvelle chance de se développer ! Lire… Congo’s new agro-industrial park isn’t perfect, but deserves a chance to grow - IFPRI
Principaux arguments : la complexité du projet et la dimension temps prenant exemple sur le développement de la ville chinoise de Shenzhen ; un curieux choix de référence vu la situation politique, sociale et environnementale de la Chine qui pille allègrement les ressources de la RDC ! Enfin, comment oser parler de « révolution verte », lorsque la première (1960) a été un échec passant de la révolution légitime, celle d’apporter à manger à tout le monde, à une révolution du profit, de la justice sociale et de la destruction de l’environnement, etc., alors que d’autres solutions existent.
Le fondement même de la création des parcs agro-industriels n’est pas de nourrir le Monde mais de faire du profit (Les fameuses chaînes de valeur et la spéculation alimentaire) ! L’attitude des politiques centrée sur le profit au détriment des lois et surtout des personnes, en sont la démonstration parfaite.
L’absurdité a atteint son paroxysme lorsque les trois dirigeants des sociétés créées autour de ce parc (PARCAGRI, SEPAGRI, MARIKIN - co-responsables de ce désastre avec AFRICOM), dénonçaient en juin 2018, la mauvaise gestion du parc et recommandent son refinancement ! Hallucinant … Zoom Eco 180614 RDC : le trio dirigeant de Bukanga Lonzo œuvre pour la relance
Il serait étonnant qu’un jour soit diffusé l’ensemble de la documentation sur la gestion, les flux financiers, la comptabilité, les études de marchés, etc., de ces sociétés.
L’industrialisation de l’agriculture se fait d’une autre manière, plus sournoise, peu documentée sur la réalité de terrain, grâce à la vente de la terre, mieux connu sous le nom de « Accaparement des terres ou Land grabbing ».
Parmi l'importante quantité de documents sur le sujet dénonçant ces dépossessions illégales de terres, un communiqué de presse .pdf de la Société civile daté du 171122 observe que :
- Le projet a été financé par le Gouvernement sans qu’il ait été prévu au budget national de l’exercice en cours, ni avoir été autorisé par le Parlement, échappant de ce fait à tout contrôle parlementaire.
- Le lancement de ce projet qui n’a pas été précédé de l’étude d’impact environnemental et social, a été suivi de l’occupation sans accord des ayant droits, des terres arables coutumières pourtant occupées et exploitées par les populations locales pour l’agriculture et la satisfaction de leurs besoins primaires.
- Les entretiens réalisés auprès des populations environnantes du Parc au cours de missions d’enquêtes organisées, ont fait part des doléances et témoignages qui révèlent que plusieurs terres appartenant aux communautés ont été récupérées et affectées à l’exploitation du parc.
- L’accaparement de ces terres communautaires au profit du projet du Parc n’a pas été précédé d’une négociation libre, préalable et éclairée avec les populations locales et plus spécialement les ayant droits desdites terres.
- Il a aussi été observé que, non seulement le Parc Agro industriel de Bukanga-Lonzo avec l’accord Gouvernement a occupé anarchiquement les terres des populations locales sans leur consentement, mais aussi et surtout qu’il les a occupé, sans justes indemnisations aux familles et clans victimes.
Land grabbing = Opportunité pour des congolais.e.s peu scrupuleux
Si l’accaparement des terres est largement attribué à des pays grâce à la duplicité des dirigeants et de l’administration congolaise en toute illégalité en regard de la Constitution et des lois et aux regards des engagements politiques sur l’agriculture durable, il est aussi du fait de citoyens congolais agissant avec les mêmes violences et avec la même complaisance des « responsables » politiques et administratifs du pays.
180607 Lavigerie.be - Parc agro-industriel Bukanga Lonzo : un cas d’accaparement des terres organisé par l’Etat et la communauté internationale. Depuis que la route a été refaite, l’accès à Kinshasa est plus facile, et de nouveaux venus ont acquis de grandes propriétés dans le Bandundu. Expropriés, spoliés, les paysans dénoncent désormais le manque de terres cultivables, l’alourdissement de la pyramide des taxes, etc…
Land grabbing, pourquoi se gêner ? L'exemple vient d'en haut !
Mr Joseph Kabila, autoproclamé le Raïs ou surnommé le « Propriétaire » a souvent montré qu’il était possible de s’approprier des terres ou des biens (la ville de Kalemie devient SA ville) sans être inquiété par la Justice ou les administrations publiques et pour cause, la mafia est partout. La raison du plus fort est toujours la meilleure...
Mbobero - Indignation. Enfin, cela bouge !
Rebondissement à Mbobero - 17/04/19 - Joseph Zahinda, le président du comité des victimes de démolitions de Mbobero en ces mots : « L’ancien président de la République a pris ce champ sans procès et nous y entreront aussi sans procès. N’oubliez pas que les gens de Kingakati sont dans leurs champs, à Goma comme ailleurs. Une fois rentrés dans nos champs respectifs, nous réclamons qu’il construise notre hôpital moderne qu’il a détruit parce que la santé est d’une importance capitale chez nous, qu’il reconstruise nos maisons, qu’il rétablisse l’électricité et l’eau. Nous voulons aussi la sécurité. Nous refusons la présence de ces soi-disant gardes républicains chez nous. Il faut qu’ils partent car ils tuent les gens. Ils avaient tiré à bout portant sur Cedric Bashimbe, chose qui a causé son décès. Lire la suite Le Souverain
Land grabbing - Deux - trois références...
GRAIN est une petite organisation internationale qui soutient la lutte des paysans et des mouvements sociaux pour renforcer le contrôle des communautés sur des systèmes alimentaires fondés sur la biodiversité. Dans l’article du 7 juillet 2016, Accaparement mondial des terres agricoles en 2016 : ampleur et impact .pdf, il est estimé que « Le développement de l'agro-industrie est le principal objectif ».
L’article GRAIN 181106 L’accaparement des terres perpétré par les fonds de pension dans le monde doit cesser .pdf dénonce les méfaits du système de l’économie virtuelle sur les Droits humains.
Land matrix donne un aperçu des acquisitions foncières à grande échelle. Situation pour la RDC .pdf Les chiffres peuvent ne pas correspondre à ceux donnés par GRAIN. GRAIN s’en explique dans l’article de juillet 2016.
Autre dénonciation récente : Greenpeace 190228 Déforestation en Afrique : le gouvernement de la RDC hors-la-loi
Outre l’agro-industrie et l’exploitation du bois, l’exploitation minière est aussi une des raisons de l’accaparement des terres. Lire le dossier : L'or du Sud-Kivu
A suivre ...
Si après la lecture de tous ces rapports à charge de l’agro-business, il est encore affirmé que l’agro-industrie permet l’enrichissement des populations, qu’il est garant du respect des lois, des personnes, de la biodiversité, en bref de leur présent et avenir, c’est de l’aveuglement, du déni de réalité.
Avril 2019, vu le discours dominant en RDC et ailleurs dans le Monde, sur le « modernisme du développement » dépendant essentiellement des « investisseurs » étrangers, il n’est pas certain qu’avec le nouveau président mal élu, Mr Félix Tshisekedi, et l’entourage des médiocres qui composent la majorité de la classe politique actuelle, la politique agricole évolue rapidement vers plus de bon sens ... Mais tant mieux si je me trompe sur la capacité du Président à changer le Monde, enfin si c'était déjà la capacité à transformer la politique en RDC.
Il faut croire que le rapport produit par Oakland Institute contribuera à penser autrement l’agriculture en RDC et à s’indigner de l’inacceptable comportement des autorités du pays.
Les opinions exprimées dans cet article sont les miennes.
Tous les articles consacrés aux Parcs Agro-Industriels